Bref aperçu monographique de Forécariah
Par Nètè Sovogui

Ckry, 22 oct (AGP)- Forécariah est une préfecture de la région de la Basse-Guinée qui représente la partie méridionale de cette région naturelle qui, de par sa position géographique, le cosmopolitisme de ses agglomérations et ses potentialités agro-pastorales, offre un sujet très intéressant, indique, a-t-on, dans un document intitulé «Monographie légère de Forécariah» daté d’août 2003.
Géographiquement, la préfecture de Forécariah est limitée au nord, par la préfecture de Coyah, au sud, par la République de Sierra-Léone, à l’est, par la préfecture de Kindia et à l’ouest, par l’Océan atlantique. Sa superficie est de 4250 km² avec une population estimée à 201.193 habitants dont 104.614 femmes et une densité de 27 habitants au km².
D’après les ordonnances n° 093/PRG du 17 avril 1985 et n° 050/PRG du 4 février 1986, la préfecture compte neuf (9) sous-préfectures ou communautés rurales de développement, à savoir Sikhourou, Moussayah, Maférinya, Kakossa, Kaliah, Kaback, Farmoréah, Benty et Alassoyah plus la commune urbaine; regroupant six (6) quartiers et quatre vingt trois (83) districts ruraux installés tous sur la base des «solidarités naturelles».
La structure du relief de la préfecture n’est pas uniforme et est dominée au Nord-Ouest par une chaîne de montagnes dont le point culminant est le mont Benna haut de 124m; le nord-Est, est marqué par la présence des plateaux et la partie moyenne, présente une configuration relativement accidentée avec un sous-sol assez rocheux.
Son climat est de type tropical sub-guinéen et se caractérise par l’alternance de deux saisons d’égale durée: une saison sèche de novembre à mai; une saison pluvieuse de mai à octobre.
Ce climat subit l’influence de la mer et la disposition parallèle du flanc occidental du massif du Fouta Djallon avec pour vents dominants, l’harmattan et la mousson. Les précipitations varient entre 3000 et 4000mm de pluie par an. Les 80% de cette pluie tombent entre juin et septembre. La température moyenne est de 250°C.
Au plan hydrographique, la préfecture est riche et sa côte découpée en larges estuaires, est semée d’Iles et d’Ilôts. Du Nord-ouest, au sud ouest, les fleuves côtiers de la Moribaya, de la Gbéréyiré, de la Tanna, de la Mellacorée, ont un régime régulier.
Plusieurs rivières arrosent aussi la préfecture, à savoir, la Forécariah, qui traverse la ville de Forécariah dont elle porte le nom et est formée de deux rivières: Kaambo et Baffou, qui prennent leur source dans les montagnes du Kania (Kindia) et qui reçoit la Kassogué et le Kissi-Kissi; la Tanna est une rivière dont l’embouchure est un dédale de marigots communiquant au nord avec la Forécariah; la Koulèté est une rivière qui coule à 8 km de Forécariah; la Kili passe par Fanyé.
La mangrove et les palétuviers en bordure de l’Océan avec des peuplements de cocotiers, se situent aux alentours de la Tanna, dans les Iles Kaback, Kakossa et Mabala. On rencontre aussi de la végétation arbustive à Moussayah, Maférinyah, Kaliah, Alassoyah, Benty et Sikhorou.
Les populations tirent grand profit des arbres fruitiers qu’on trouve autour de leurs habitations à savoir, les Kolatiers, les manguiers, les cocotiers, les orangers, les papayers etc.
Le palmier avec ses différentes variétés (rônier etc) est l’espèce la plus fréquente.
La faune autrefois très riche, se dégrade de plus en plus sous l’action cumulée des hommes et des intempéries. L’élevage se pratique à l’échelle familiale et concerne la volaille, les caprins et les bovins.
Cette faune très abondante en espèces, compte des cynocéphales; des ruminants, des carnivores, des palmipèdes, des samiers, des poissons, des reptiles, etc.
Au plan migratoire, les premiers occupants de l’actuelle préfecture de Forécariah furent des Mandenyi qui reculèrent devant la poussée envahissante des Soso. Les Maninkamory ont occupé Forécariah au 18ème siècle et fondé la ville de Forécariah ayant à leur tête le patriarche Fodé Katibi Touré. Au regard de l’histoire, trois groupes de populations ont occupé la préfecture de Forécariah avant le 19ème siècle. A ces groupes s’ajoutent les peulhs dont l’arrivée se situe à la fin du 19ème siècle.
Les Mandenyi habitaient le terroir il y a quarante (40) ans, avant de reculer devant la poussée Soso.
Ce recul des Mandenyi a permis de laisser aux Soso le Kamalaya, le Kissi-Kissi et le Benna. Fervents agriculteurs, les Mandenyi se retrouvèrent dans les zones rizicoles de Samou-Benty, Kaback et Kakossa.
Les Soso, suivant le Bassin du Konkouré, occupèrent le Khabitaye, le Labaya et le Bouramaya (Dubréka).
Et le second groupe longeant le scarie, s’empara du Benna et du Tamisso chez les Mandenyi. Après de longs et violents affrontements, les Soso réussirent à s’implanter à Kamalaya, Kissi-Kissi et à Moribayah. Ils fondèrent les villages importants de Walia, Moussayah, Gbéréyiré Layah, sous la direction d’un groupe migratoire composé de Soumah, Doumbouya, Bangoura et les Camara Djallonka.
Les Maninkamory, constituent le troisième groupe à venir s’installer à Forécariah vers la fin du 18ème siècle.
L’aventure de plusieurs mois a amené à Forécariah, trois patriarches: Fodé Katibi Touré, Fodé Aboubacar Yansané et Aboubacar Fofana. L’invasion Maninka s’éffectua ainsi après celle des Soso.
Débordés, les Soso tenteront, mais en vain, de repousser les Maninkamory qui étaient fortement cultivés par la propagation de la foi islamique. Les Maninkamory fondèrent de nombreux villages parmi lesquels: Forécariah, Moribayah, Farmoréah, Toumaniah, Alassoyah, Tanna, Yenguissa, Mellakoré, Maliguiah, Forodougou, etc.
En plus des Touré, Fofana et Yansané, il existe à Forécariah, d’autres groupes de Maninka tels que les Kaba, Cissé, Diané.
Les Peulhs constituent actuellement les couches commerçantes les plus importantes de la préfecture, de par leur nombre. Parmi ce groupe, on dénombre des éleveurs à la recherche du pâturage à Forécariah en passant par les villages de Tènè, Madina Oula, Sèguèya (Kindia) avant d’arriver à Benna, Moussaya, Farmoréah, Benty, Kaliah, Alassoyah, Maférinya.
Au plan de la vie socio-économique, la préfecture de Forécariah reste une zone de prédilection pour toutes les activités économiques, notamment l’agriculture, la pêche, la chasse, l’élevage, l’artisanat, le commerce à cause de son ouverture sur l’Océan Atlantique, ses sols fertiles, ses pluies abondantes, la présence des forêts classées, sauvages et son climat «doux et tolérant».
Au niveau de l’agriculture, malgré les réformes administratives engagées depuis 1985 par l’Etat guinéen, qui ont favorisé la naissance de nombreuses coopératives et groupements locaux, les rendements restent encore très faibles à cause de la rareté de moyens modernes de production.
Au plan des activités socioculturelles, Forécariah se caractérise par des notions de parenté et d’alliance.
Les Touré se réclament tous d’un même ancêtre ainsi que les Yansané, les Fofana, etc. Par les liens de mariage, les différentes familles se sont unies davantage. Cette alliance sociale s’est également étendue aux autres groupes autochtones.
La population de Forécariah est la résultante d’un brassage culturel des ethnies Soso, Maninka, Mandenyi et Bagas. On constate une interpénétration étroite des langues, coutumes, mœurs et traditions.
La polygamie y est très observée, eu égard aux traditions anciennes.
Toutefois, Forécariah est une société patrilinéaire et souvent, le mariage est à résidence patrilocal.
Sur le plan de la stratification sociale, Forécariah, à l’instar de beaucoup de sociétés guinéennes, n’a pas échappé au système de castes. Des hameaux peuplés par des esclaves sont encore visibles de nos jours: Forogoyah, N’Bendia.
Les Mandenyi pratiquent des activités animistes telles que les denses rituelles consacrées à l’adoration des Dieux.
Les Maninka évoquent et gardent toujours la fierté de leur origine et ont conservé leur héritage Mandingue. Le premier Imam fut le patriarche Fodé Aboubacar Touré, dénommé Katibi Touré. Depuis, 13 imams dont Elhadj Bissiri Fofana se succèdent sur le trône. La préfecture compte aujourd’hui 300 mosquées dont 80 dites mosquées du vendredi saint. Il existe 14 écoles franco-arabes. 40 medersas et 600 écoles coraniques.
Avec l’arrivée des européens (anglais d’abord, puis les français) au 19ème siècle, les enfants des marabouts furent les premiers à fréquenter les écoles coloniales.
La première école coloniale a été implantée à Benty en 1905 puis transférée à Forécariah-centre.
De tout ce qui précède, il ressort que la mise en place des populations de Forécariah a donné un visage humain et est la résultante d’un brassage culturel de nombreuses ethnies.
AGP/22/10/04 NS/AB/MAC/FK